par Eric Zemmour - le Figaro 11 avril 2020
CHRONIQUE - L’affrontement du peuple contre les élites, de la Province contre Paris, se déplace sur le terrain scientifique et médical.
La science a pris le pouvoir. Le
Président n’a pas un mais deux conseils scientifiques pour l’entourer.
Le premier ministre ne prononce plus une phrase sans citer le patron de
l’OMS. Le ministre de la Santé avoue qu’il consulte les médecins avant
de prendre ses décisions. La science dirige les moindres pas de la
politique, qui est fière de son assujettissement. C’est le triomphe du
saint-simonisme qui, dès le XIXe siècle, prophétisait le remplacement du «gouvernement des hommes» par le «gouvernement des choses».
Mais voilà, la science n’est pas la vérité ; elle est, comme le dit fort pertinemment Henri Guaino,
une méthode pour accéder à la vérité. L’histoire des sciences est
pleine de bruit et de fureur, comme toute histoire humaine. Les
querelles de doctrines et d’ego ne sont pas moins fiévreuses que dans la
politique, les affaires, l’administration, l’armée, la justice, la
littérature, l’art, le journalisme, etc.
Depuis
le début de cette épidémie, les médecins se déchirent et disent tout et
son contraire. Untel parle de «grippette», puis prend des accents
apocalyptiques. Un autre tient le confinement généralisé pour une
méthode du Moyen Âge, puis s’y rallie. La soi-disant autorité suprême,
l’OMS, est une vraie girouette. Un jour contre les masques pour tous,
puis pour ; un jour contre les tests pour tous, puis pour. Ce n’est pas
parce qu’elle s’occupe de santé que l’OMS n’est pas une organisation
internationale comme les autres, avec ses luttes d’influence, en
particulier entre Chinois et Américains.
Principes de la courtisanerie
En
France, il en est de même. On sait désormais que le Pr Raoult s’est
fait de nombreux ennemis et que cela influence beaucoup de jugements
négatifs de ses pairs sur le traitement qu’il propose. On sait aussi
qu’au sein des conseils scientifiques, les lois de la science sont bien
souvent écartées au profit des vieux principes de la courtisanerie. On
avait pu l’observer lors des prétendues consultations de conseils
scientifiques à propos de la PMA. Le pouvoir veut organiser les
municipales? La science dira que ce n’est pas dangereux. Il y a pénurie
de masques? La science dira que le masque n’est pas indispensable. On
n’a pas de tests? La science dira que le test pour tous est une hérésie.
Le
pouvoir politique est à la fois le maître de ces manipulations et sa
victime. Emmanuel Macron, Édouard Philippe, Olivier Véran essaient de
dissimuler sous l’auguste manteau de la science la litanie de leurs
carences, échecs, injonctions contradictoires. L’ennui, c’est que cela
se voit. Personne n’est dupe. Les scientifiques étant mis sur le pavois,
le peuple s’empare de leurs querelles et fait de l’un d’entre eux, le Pr Raoult, son héros.
L’affrontement du peuple contre les élites, de la Province contre
Paris, se déplace sur le terrain scientifique et médical. Raoult devient
malgré lui «gilet jaune» d’honneur. Comme si, avec son allure de
druide, ce savant chercheur était le nouve lopposant au «système» d’un
peuple qui cherche désespérément une force d’alternance politique qu’il
enrage de ne pas trouver.
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