Boutier Jean-Claude, seule votre disparition pouvait me faire renoncer à mon silence estival, à esquiver l'actualité pendant ces mois d'été et me pousser à redescendre sur le net depuis les hauts plateaux cantaliens, le temps de vous dire "adieu".
Pourquoi ai-je aimé la boxe ? Cela remonte sans doute à la cour de récréation de l'école primaire. J'étais déjà petit et "dense" mais lorsque je me lançais dans les parties de Gendarmes et aux Voleurs en faisant des moulinets avec mon bras droit pour délivrer les prisonniers, je me suis vite aperçu que cela fonctionnait.
A l'époque de Jean Claude Boutier, peu d'images circulaient à la télévision en noir et blanc et c'est sans doute par leur rareté qu'elles sont restées gravées dans ma mémoire. Ce fut pourtant essentiellement à la radio que j'ai suivi les combats de Frazier, Foreman, Clay, Menetrey et Boutier. Sur mon transistor à piles Optalix, j'écoutais sur les grandes ondes la retransmission des combats, à l'époque on ne disait pas "match". Il me fallait parfois veiller tard, ou même se réveiller la nuit en cachette des parents pour suivre les retransmissions en direct.
Jean-Claude Boutier contre Carlos Monzon, l'Argentin Champion du Monde. Depuis Marcel Cerdan, pas un Français n'avait disputé un combat à ce niveau. Boutier abandonnera sur blessure au 13ème round et sera battu aux points lors de la revanche à Paris. Combien de fois gamin, c'était en 72/73, ai-je refait le combat face à la glace de mon armoire ?
La brûlure des cordes. J'ai pratiqué avant la boxe d'autres sports de combat et d'autres sports tout court mais aucun d'eux ne m'a semblé aussi exigeant, aussi dur pas même les marathons que j'ai bouclés.
La boxe est un résumé de la vie sur un espace de 5 mètres sur 5. Une fois sur le ring, comme dans l'existence, on ne peut échapper à son destin. On se retrouve face à un type qui ne vous veut pas que du bien, qui veut tout vous piquer et vous ne pouvez compter que sur vous-même.
Pas d’échappatoire, le plus malin, le plus bosseur et celui qui a deux marteaux aux bouts des bras vaincra. Une leçon pour la vie au quotidien.
Pas d’échappatoire, le plus malin, le plus bosseur et celui qui a deux marteaux aux bouts des bras vaincra. Une leçon pour la vie au quotidien.
C'est bien des années plus tard que je suis devenu un petit boxeur de quartier. J'en ai profité une grosse dizaine d'années. J'ai aimé donné mais aussi recevoir des mornifles et la boxe m'a permis de rencontrer des gens dont je n'aurais jamais croisé le chemin. J'ai connu de sacrées enflures mais aussi gardé l'amitié de vrais boxeurs avec qui j'ai plaisir de temps à autres à remettre les gants, juste en souvenir du craquement des planches du ring, de la sonnerie des 3 minutes, du sifflement des cordes à sauter, du bruit de la poire sur le bois et des portraits de Marcel Cerdan, Roger Menetrey et Jean Claude Boutier qui ornaient les murs de ces salles à l'atmosphère saturée de vapeur et de sueur.
C.Dragasès
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